Ibrahim Khalil, Iraq - Polarsteps
Simple parenthèse sur notre passage de la frontière, assez cocasse.
C'est juste moins marrant niveau budget.
Tout commence bien, on est arrivé à l'heure pour notre bus de nuit, on s'apprête tranquillement à passer une mauvaise nuit après le passage de frontière.
Sauf que celui-ci s'annonce plus compliqué que prévu.
On commence par re-payer un test PCR à la frontière. Apparemment ils ne font pas confiance à ceux turcs. C’est sûr que les leurs où il frotte à moitié la joue doivent être plus précis …
Une grosse blague ce test dont on ne recevra jamais les résultats, et 50$ facile pour l’Iraq.
Jusqu’ici on a de l’argent, et c’était prévisible alors ça reste bonne ambiance. Surtout qu’un jeune parlant (un peu) anglais nous aide et nous demande de courir dans tous les sens. Excitation aidant, c’est marrant.
Jusqu’à ce qu’on se retrouve face au général moustachu des années 80 responsable de la frontière. Qui nous demande 45$.
Déjà c’est moins marrant parce qu’on n’a pas le choix et parce que comme c’était censé être gratuit, on n’a plus d’argent.
Et il n’y a pas de distributeurs.
Et il fait nuit.
Et le bus nous attend.
On essaie de négocier comme on peut, mais rien à faire, le petit roi de la frontière à les pleins pouvoirs et est têtu (on apprendra par la suite que c’est l’Irak qui gère la frontière, et que ces 45$ vont directement à l’état, pas de pot-de-vin mais une escroquerie d’état).
Là on rigolait moins. Enfin jusqu’à ce que le bus entier se mette en conseil de guerre pour nous aider. On se retrouve assis avec un « leader » entourés d’une vingtaine de Kurde. Un semi traducteur français-kurde, un semi-anglais kurde, des liasses de dinars sorties pour essayer de trouver une solution.
C’était suffisamment comique pour nous faire rire malgré tout.
Bon il nous reste quelques euros, des liras, donc on arrive à convaincre un gars de nous prêter des dinars.
Retourner au guichet du moustachu, et c’est devenu 65$. Là oui ! Là ça sera du pot-de-vin.
On retourne dehors, reconseille de guerre.
Mais cette fois plus une thune donc le conseil de guerre doit convaincre un vieux gripsou de nous avancer de l’argent qu’on retirera dès que possible. C’est le chauffeur du bus.
On retourne donc (en courant toujours, on n’a pas arrêté depuis le début) au guichet, le moustachu à un sourire en comptant les billets qui me donnerait envie de ruiner nos relations diplomatiques…
A ce moment de l’histoire on a du mal à digérer notre seum, surtout moi. Alors qu’en le lendemain on nous réveille à mi-chemin (Erbil) pour qu’on aille retirer de l’argent je ne rigole plus du tout.
Et histoire d’en remettre une couche on nous demande plus d’argent que ce qu’on a vraiment emprunté. Quelqu’un a gardé des billets pour lui.
Donc Julien part retirer et négocier, pendant que je suis à deux doigts de manquer fort de respect à notre traducteur français qui ne cesse de répéter « tu donnes l’argent et pas de problème » et que je soupçonne fort d’être le voleur.
Et comme il faut toujours faire dans la surenchère, notre bus part sous mes yeux, me laissant sur le quai avec nos valises et mon seum…
Bon je crois que c’est le moment de relativiser et de s’entraîner au lâcher prise.
Julien revient, on sort le petit déj’ sur le quai d'une ville qui n'est pas celle prévu... trop c'est trop: on rigole ! Certes encore un peu jaune. Mais mon monde n’est plus rouge.
Et entre temps le chauffeur nous a dégoté un nouveau bus qui part dans 3 heures.
On se pose sur un banc au soleil, Julien sort le banjolélé et on chante de la merde. Le temps est bon, la vie est belle. Kurdistan, on est là !
Le préambule est fini
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Croissant Turc
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Ibrahim Khalil